Rencontre avec Jean-Bernard Guyot, associé-coopérateur dans la Marne
Lorsqu’il reprend la ferme familiale en 2001, Jean-Bernard remplace l’élevage de moutons par… une microbrasserie ! Dès 2014, il installe des panneaux solaires puis plante l’année suivante 15 hectares d’arbres en vue d’alimenter une chaudière biomasse pour la brasserie. Pour Jean-Bernard, c’est le début de « sa » transition.
Car même si la chaudière biomasse ne verra finalement jamais le jour, il vient de découvrir l’agroforesterie et ses multiples atouts : paysage plus attrayant, refuge à toute une petite faune précieuse… « Les deux ou trois premières années, nous avons eu une invasion de souris », reconnaît Jean-Bernard, « mais le milieu s’est ensuite très vite autorégulé. Et les buses, les renards et le travail du sol se sont chargés des campagnols. Côté productif, l’arbre redonne de la fertilité au sol : ses 200 kilos de feuilles, en se décomposant, fournissent une matière organique gratuite et ses racines agissent comme un puissant filtre pour éliminer les nitrates dans les nappes phréatiques », explique-t-il. « Le sol est décompacté, redevient vivant, micro-organismes et champignons s’y développent… Même si l’on réduit les surfaces agricoles, on produit beaucoup plus de biomasse à l’hectare ! Et l’ombre créée climatise les parcelles et évite aux cultures un stress trop important durant les coups de chaud de juin. »
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45hectares d'agroforesterie
Et d’ici 30 ans, les sols deviendront plus autofertiles.
Définitivement convaincu, Jean-Bernard passe la totalité de ses 68 hectares de cultures en bio en 2018 et se consacre à temps plein à son nouveau projet d’agroforesterie, cette fois orienté vers le bois d’œuvre pour le bâtiment ou l’ébénisterie à l’horizon de 40 ans ou 50 ans.
En 2020 et 2021, Jean-Bernard va planter 33 hectares supplémentaires de plusieurs espèces (merisier, alisier, érable, noyer…) en bandes de 28 mètres pour ne pas gêner le passage des engins. « Techniquement, ce n’est pas si compliqué et le travail de taille ne représente que cinq heures par hectare et par an », précise-t-il. « Le coût, environ 1500 euros par hectare, est financé a minima à 80% avec le Plan national haies. »
Jean-Bernard en est convaincu : « Le frein pour bouger, tester et faire évoluer nos modèles est surtout dans nos têtes…». L’association Agroforesterie Nord-Est, fondée il y a huit ans avec huit autres exploitants, compte aujourd’hui une vingtaine d’adhérents. « Si on plante tous massivement, on va régler pas mal de problèmes. Et d’ici 30 ans, les sols deviendront plus autofertiles », conclut-il.
Le paillage au pied des plantations maintient l'humidité au sol et évite la prolifération de mauvaises herbes...